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Chronique rédigée pour le magazine MEGALO (Décembre 2016) "Oser penser le couple", par Bertrand Mattei Françoise Sagan disait que « Les lois sont faites pour s’adapter aux hommes et non le contraire ». Pourtant, c’est précisément le contraire que fit l’État le 20 Septembre 1792. Il instaura le mariage civil en s’accaparant les sentiments amoureux et la sexualité. Le couple devint la norme. Un couple dont la légitimité passe encore aujourd’hui par le mariage et qui, entre autres, prévoit pour les époux des obligations de respect, de fidélité, de direction morale et matérielle de la famille, d’éducation des enfants et de vie commune. En ce 20 Septembre 1792 l’état nous somma, à tous, de vivre à l’identique. Le sacro-saint couple fut imposé comme le garant de la sociabilité. Marcela Iacub en rappelle le bilan : 21% des français ont des tendances dépressives, un sur quatre n’a aucun ami, cinq millions sont en situation d’isolement, 21% se sentent seuls, plus d’un ménage sur trois est composé d’une seule personne, 16 millions de personnes en couple éprouvent l’envie d’y mettre un terme, le nombre de mariage diminue et celui des divorces augmente, 160 000 enfants assistent tous les ans au divorce de leurs parents, 40% d’entre eux ne voient plus leur père et ce sont chaque année 220 000 personnes qui tentent de se suicider. Pourtant, force est de constater la stérilité de nos esprits lorsqu’il nous faut concevoir des alternatives au couple. Lui qu’on nous vend depuis des siècles comme la quintessence de l’humanité, lui qui est ancré dans nos esprits tel Excalibur dans le rocher. Dans un essai paru chez Stock au mois d’Octobre 2016 et intitulé La Fin Du Couple, Marcela Iacub sonne l’alarme : « si nous ne faisons rien, il y aura de plus en plus de gens seuls, la solitude va s’accroître ». Regardons la réalité en face : ceux qui ne sont pas en couple attendent l’amour, ceux qui échouent dans une relation concluent qu’il ne s’agissait pas de la bonne personne et on voit s’éveiller autour de ceux qui collectionnent les déboires amoureux des soupçons de problèmes psychologiques. Le couple serait dangereux pour l’égalité et pour le bonheur. Il serait partiellement responsable des inégalités entre femmes et hommes, entre homosexuels et hétérosexuels, et des sentiments de frustration et de culpabilité. De plus, il gangrènerait la sexualité que nous soumettons à un projet conjugal, alors que cette incroyable énergie à la puissance merveilleuse pourrait être utilisée pour bâtir la sociabilité et profiter à un plus grand nombre. Au lieu de forger l’isolement. En se basant sur l’hypothèse de Fourier, Marcela Iacub propose une alternative révolutionnaire : la philanthropie sexuelle. Selon celle-ci, le sexe ne saurait se limiter au seul désir. Il pourrait être utilisé de façon altruiste, en donnant du plaisir sans forcément assouvir ses propres désirs garantissant le droit à un minimum sexuel (un devoir pour les plus beaux et les plus jeunes de donner du plaisir à ceux qui en ont besoin). Ainsi, nul ne ferait l’expérience de la frustration. Si nous pouvons être généreux avec l’argent et la nourriture, pourquoi ne le serions-nous pas avec la sexualité ? Quid des relations ? Marcela Iacub considère tout à fait raisonnable d’avoir une dizaine de partenaires. Ainsi, nous serions moins tristes lorsque la relation avec l’un d’entre eux toucherait à sa fin et nous serions en permanence dans l’attente exaltante de prochains rendez-vous. En ajoutant à cela la philanthropie sexuelle – pour l’estime de soi – nous obtiendrions un équilibre viable. Les sentiments ne seraient pas la meilleure façon d’explorer la sexualité. Lorsqu’un rapport sexuel est motivé par l’amour, on pense finalement plus à l’acte d’amour qu’au sexe lui-même, ce qui détourne du réel. Quant à l’amour, à chacun de le placer là où il le souhaite. Ne confondons pas la fin du couple avec la fin de l’amour. Comme le dit Michel Onfray : « Ne pas vouloir s'engager pour la vie dans une histoire de longue durée n'interdit pas la promesse d'une douceur amoureuse ». Notre challenge serait de dépêtrer la sexualité du couple afin de pouvoir jouir de cette chance inouïe qui nous est donnée de nous associer aux autres. Ne serait-ce pas faire acte de faiblesse que de coller à Marcela Iacub une étiquette de provocatrice ? Son propos est certes avant-gardiste mais il invite avant tout à la réflexion. Penser le couple serait devenu un véritable challenge intellectuel. Oserez-vous ? Voir l'article dans MEGALO Acheter (site de l'éditeur) La fin du couple Marcela Iacub Editions Stock Octobre 2016 157 pages 17 euros
3 Commentaires
Jeanfi
23/12/2016 23:21:49
Quand j'ai vu le titre je me suis dit que tu allais sûrement sortir un truc genialissime (et dément). Me suis pas trompé ...!!!!
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Sophie Pastor
24/12/2016 01:00:23
C'est super Bertrand, beau travail. Je viens de commander le livre "La fin du couple", tu m'as donc bien donné envie de le lire. De plus, j'ai beaucoup d'estime pour Marcela Iacub.
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Bertrand Mattei
18/2/2017 13:10:18
Quel plaisir que de lire cela ! J'espère qu'il t'a plu si tu l'as lu depuis.
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